Les systèmes deltaïques évoluent en fonction des interactions entre les processus hydroclimatiques qui se produisent au niveau du bassin versant et les processus marins côtiers qui remodèlent le littoral. L'évolution de ces environnements est contrôlée par le climat, la tectonique et l'anthropisation, rarement prise en compte dans les modèles d'évolution des systèmes sédimentaires.
Le delta du Rhône a enregistré l'impact des variations climatiques ainsi que le développement et l'évolution des sociétés humaines au cours de la période holocène. Ce système a connu une évolution post-glaciaire contrôlée par un réchauffement climatique global ponctué par de courtes périodes de refroidissement, de métamorphoses fluviales, et par une transgression marine rapide générée par la fonte des calottes glaciaires, suivie par l'initiation de la progradation du delta à partir d'environ 8000 BP qui s'accélère durant l'antiquité romaine. La dynamique du système a été modifiée durant le Petit Âge Glaciaire (PAG, 1350-1850) sous les effets combinés d'un refroidissement climatique et de l'effet croissant de l'anthropisation. La période post PAG PAG correspond à une diminution de la fréquence des crues et à la baisse globale des précipitations, favorisant l'impact des activités humaines qui sont devenues de plus en plus importantes jusqu'au 20ème siècle. La révolution industrielle et la mécanisation ont entraîné une augmentation drastique des flux de sédiments en raison de la déforestation, et de la généralisation de l'agriculture intensive. Dans les années 1950, ce signal s'inverse avec la prolifération des barrages dans de nombreux cours d'eau, ce qui génère une réduction de la charge sédimentaire.
Des études sédimentologiques et chronostratigraphiques de 17 carottages complétant un jeu de données existant sur la plaine deltaïque ainsi que sur le prodelta a permis de construire des corrélations stratigraphiques bien contraintes, permettant de préciser l'évolution spatio-temporelle du delta du Rhône. La variation des flux sédimentaires a été évaluée pour les différentes séquences identifiées, grâce à l'apport de nouvelles datations de carottes qui ont permis de contraindre l'évolution séquentielle des lobes. L'ensemble de ces données met en évidence des périodes contrastées correspondant à la période pré-PAG, le PAG, le post-GAP, la révolution industrielle et enfin « l'anthropocène ».