De nombreux embranchements animaux – des spongiaires aux chordés - ont commencé à élaborer des structures calcifiées autour du Cambrien. Cet évènement « biominéralisant » (voire, cette succession d'évènements biominéralisants indépendants) s'est accompagné de bouleversements génétiques, qui concernent à la fois la régulation et le développement en amont de la calcification elle-même, et aussi le contrôle du dépôt de la phase minérale en une microstructure bien ordonnée. Ce dernier phénomène est opéré par une matrice calcifiante, généralement extracellulaire.
Les données haut-débit récentes (transcriptomique, protéomique) montrent toute la complexité de cette matrice calcifiante, qui comprend un grand nombre d'acteurs protéiques aux origines diverses : tandis que certaines fonctions moléculaires semblent héritées de systèmes ancestraux non-calcifiants, d'autres ont été recrutées ex nihilo et apparaissent spécifiques de clades. Un des enseignements des données haut-débit est que même les microstructures calcifiées morphologiquement ‘simples' – tels les grands prismes calcitiques des couches coquillières de certains bivalves, dont la morphogenèse pourrait être expliquée par des considérations thermodynamiques ou physique - requièrent des assemblages protéiques extrêmement complexes. Se pose donc la question du lien unissant l'épithélium minéralisant, la matrice calcifiante et la microstructure biominéralisée produite. A travers quelques exemples de structures minéralisées, nous évoquerons les concepts de chimie supramoléculaire, de propriétés émergentes et d'attracteurs, qui pourraient expliquer à la fois la plasticité des systèmes calcifiants et leur pérennité à travers le Phanérozoïque.