Lors de la campagne océanographique GARANTI réalisée en 2017, des polygones géants ont été découverts sur le fond du bassin de Grenade, de 1800 à 3000 m de bathymétrie, entre la ride d'Aves et l'arc actuel des Antilles. D'une maille moyenne de 3 à 5 km ils sont clairement visibles sur les données bathymétriques et de réflectivité du sondeur multifaisceaux. En sismique ils représentent le sommet visible sur le fond de la mer d'un intervalle sous-jacent de failles polygonales qui affecte les séries sédimentaires jusqu'à plus de 1000 m de profondeur. Depuis cette découverte, l'importante base de données libre de sismique acquise par les américains depuis les années 70 a été réinterprétée et intégrée à ce projet, permettant de mettre en évidence que le réseau de failles polygonales s'étend à l'Ouest au moins jusqu'à la ride de Beata et au Sud-Est au moins jusqu'à l'entrée du bassin de Grenade au niveau des Grenadines. La surface totale couverte par ce réseau atteint presque 0.5 million de km², ce qui en fait de loin le plus grand réseau de failles polygonales contiguës jamais identifié.
Dans ce contexte, le rôle de la nature lithologique et minéralogique des sédiments affectés par cette fracturation discrète précoce est essentiel puisque les FP ne se forment spontanément que dans des sédiments argileux riches en smectite. Les analyses DRX sur les prélèvements fond de mer et sur les forages DSDP/IODP de la zone montrent que les argiles proviennent principalement de l'altération du bouclier andin et assez peu de l'arc volcanique des Caraïbes. L'Orénoque, principal pourvoyeur sédimentaire dans la zone se jette actuellement dans l'Océan Atlantique en position d'avant-arc au SE de Trinité et Tobago ce qui pose la question de la redistribution sédimentaire vers le bassin de Grenade par les courants océaniques.
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