Le développement des études paléosismologiques vise à combler notre méconnaissance de l'occurrence à long terme des événements sismiques. En France métropolitaine, les catalogues de sismicité remontent péniblement jusqu'à l'antiquité et les connaissances permettant d'estimer l'impact des séismes diminuent exponentiellement avec le temps. Donc, les sédiments lacustres sont des archives pertinentes qui pourraient conduire à tester les modèles d'aléa sismique existant au travers de l'identification de la date d'occurrence et de la période de retour d'événements suffisamment forts pour laisser une trace dans les sédiments.
Le lac d'Aiguebelette (Savoie) se situe en zone de sismicité modérée dans les chaînons du Jura méridional, au front des Alpes occidentales. Un carottage long et de plusieurs carottages courts ont été réalisés dans un sous-bassin exempt d'apports détritiques importants. La séquence composite longue couvre l'intégralité de la période post-glaciaire enregistrée sur 16 m. Une approche multiproxy a été réalisée. Elle comprend une analyse visuelle, des mesures de fluorescence X et granulométrique, une approche originale incluant un cortège d'analyses magnétiques, des images MEB et des datations.
Ces éléments nous permettent de définir une chronique de 55 évènements instantanés de type turbidite et/ou homogénite. L'aspect sismo-induit de ces dépôts instantanés est discuté à la lumière des analyses granulométriques, d'Anisotropie de Susceptibilité Magnétique et d'une comparaison avec le catalogue de sismicité sur la période historique. Nos résultats montrent la présence d'un épais évènement à la base de l'Holocène (Banjan et al., 2023), une relative régularité dans l'occurrence des dépôts jusque vers -2000 ans CE, suivi d'une période de quiescence et d'une augmentation de la fréquence à la période historique. Cette variabilité encore mal comprise est probablement à mettre en relation avec les paramètres forçant climatiques et anthropiques dans le bassin versant.
Pour évaluer la sensibilité du lac à l'enregistrement des séismes, deux méthodes complémentaires ont été utilisées: l'indice de sensibilité palier (ESTI) et la comparaison des valeurs d'accélération pseudo-spectrales obtenues par l'utilisation d'équations de prédiction de mouvement au sol à de faibles et hautes fréquences. Les résultats obtenus seront discutés. Cette étude montre l'intérêt de comprendre la sensibilité d'un lac pour mieux appréhender la sismicité d'une zone donnée.