La zone de subduction des Petites Antilles est une des rares régions du globe où une croûte formée à une dorsale lente entre en subduction. Une telle croûte est généralement constituée de portions de péridotites mantelliques exhumées puis serpentinisées. Les fluides libérés par la croûte océanique en subduction à 30-60 km de profondeur remontent le long du méga-chevauchement pour atteindre le fond de la mer où ils formeront des pockmarks et des volcans de boue. De telles remontées de fluides influencent la nature de la sismicité de la marge active. Il est alors important de quantifier ces fluides pour mieux caractériser leur impact potentiel sur la sismogénèse des marges actives.
La campagne Manta-Ray a comme objectif d'étudier les flux de fluides entrant dans la zone de subduction des Petites Antilles du nord. 75 sismomètres fond de mer (OBS) ont été déposés selon un dispositif 3D sur une portion de croute océanique récemment identifiée à la fosse comme étant constituée de roches mantelliques exhumées et nommée le Jacksonville patch. 23 profils de sismique réflexion multitrace et réfraction conjointe ont été tirés sur ces instruments. Les données présentent des arrivées utilisables sur l'intégralité des profils enregistrés. Des modélisations préliminaires de profils 2D montrent une croûte hétérogène avec des vitesses sismiques allant d'une croûte océanique magmatique à celles d'un manteau serpentinisé.
Des variations similaires ont été observées à des dorsales lentes et ultra-lentes comme la dorsale sud-ouest indienne. Les vitesses sont aussi similaires à celles identifiées le long des zones exhumées des marges passives hyper-étirées. Ainsi nous montrons que la croûte au large de la zone de subduction des Petites Antilles du nord est bien d'une lithologie comparable à ces deux derniers cas et proposons que la variabilité de vitesse observée trouve son origine dans l'accrétion à taux lent à la dorsale médio-Atlantique durant le Crétacé. Les futurs travaux sur ces données permettront de contraindre la structure et le taux de serpentinisation dans la croûte entrant en subduction ainsi qu'une éventuelle anisotropie dans le manteau supérieur sous-jacent. Un bilan quantitatif des fluides à l'entrée de la subduction pourra alors être établi.
- Poster