L'emploi de marbres dans l'architecture des sites archéologiques de l'Antiquité soulève de nombreuses questions quant à leur origine. Pourtant, les études archéométriques de provenance ne sont pas systématiques et on se limite souvent à des identifications macroscopiques et empiriques, conduisant à des diagnostiques incertains. Des analyses pétrographiques et géochimiques s'avèrent donc indispensables. Nous avons récemment entrepris une vaste étude de caractérisation des marbres architecturaux sur l'île de Délos, en Grèce, dans le cadre du projet ANR Géologie et Architecture à Délos (2018-2023). Délos est un des sites archéologiques les plus importants de la Grèce antique qui abrite de nombreux sanctuaires datant de l'époque archaïque à la fin de l'époque hellénistique. Ces constructions représentent un volume important de marbre, dont l'origine locale et/ou importée est discutée par les spécialistes de l'architecture délienne depuis plus d'un siècle. Dans un premier temps, les quatre affleurements de marbre de l'île ont été cartographiés au 1/5000e puis caractérisés pétrographiquement et géochimiquement pour identifier les marbres locaux dans le bâti. La provenance des marbres dans l'architecture a ensuite été étudiée avec une approche multitechnique destructive et non destructive, associant microscopie de terrain, microscopie optique et électronique, diffraction de rayons X, analyse des isotopes de l'oxygène et du carbone, composition chimique élémentaire par spectrométrie de fluorescence X portative et spectrométrie de masse. Chaque analyse a ses apports mais aussi ses limites, et c'est la complémentarité des techniques utilisées qui a permis d'identifier la provenance de plus de 150 prélèvements de marbre dans le bâti. Ainsi, l'origine et la chronologie des importations de marbres à Délos ont pu être déterminées pour chaque période d'occupation de l'île. Quant aux marbres locaux, il a été possible de définir les périodes d'exploitation des carrières et leur type d'usage.