La fosse de la Hague constitue une cicatrice morphologique sous-marine remarquable au large du nord du Cotentin. Ce système érosif et sédimentaire s'est probablement principalement développé au cours des phénomènes eustatiques du plio-quaternaire mais sur un bâti complexe et hétérogène composé d'un socle cristallin protérozoïque et cadomien, de séries sédimentaires paléozoïques et de la couverture mésozoïque. Ce bâti est structurellement marqué par l'emprunte et l'héritage des orogenèses cadomienne et varisque. Il est par ailleurs réactivé par l'inversion cenozoïque de la Manche dont les contrecoups tectoniques induisent les accidents préférentiels que le paléo-fleuve Manche emprunte formant les autres fosses comme celle des Casquets. La compilation de données bathymétriques haute résolution réalisée dans le cadre de la thèse de Tassadit Kaci couvre l'intégralité de cette zone et permet de proposer une carte géologique remarquable basée sur l'analyse morphologique des textures, le continuum terre-mer, et les informations parcellaires des prélèvements. Toutefois la dimension verticale faisait défaut pour contraindre la morphologie, la géométrie et l'organisation des unités en particulier sédimentaires dans la première centaine de mètres sous le fond. C'est pourquoi, en juin 2022, nous avons réalisé un levé de sismique multitrace plateau (EMECHAT : https://doi.org/10.17600/18002075) qui, une fois traité, apporte un éclairage nouveau et pseudo 3D de cet objet. Sa terminaison sud-ouest semble contrôlée par l'héritage structural du bâti et potentiellement les soulèvements récents (Pedoja et al, 2018) de la pointe de la Hague se traduisant par des morphologies érosives originales des corps sédimentaires. Sa partie septentrionale et orientale semble plus conforme aux autres fosses (Lericolais et al., 2003) révélant l'importance de l'inversion cénozoïque dans la localisation et le remplissage fluviatile plio-quaternaire d'un système sédimentaire plus mature. Ce système est couvert de dunes hydrauliques probablement post-glaciaire qui signent les directions dominantes des courants chenalisés par la fosse elle-même. A la lumière de ces résultats, nous constatons un manque d'échantillon pour un calage temporel plus solide et la nécessité d'établir le lien avec la fosse des Casquets et le système Manche ; c'est tout l'objet de la campagne EMECHAT 2 prévue en juin 2024 et d'une future thèse.